13/06/2009 / Le Point.fr
Les partisans Mir Hossein Moussavi, largement battu à la présidentielle en Iran, sont dans la rue pour manifester leur colère et dénoncer une fraude AFP PHOTO/OLIVIER LABAN-MATTEI
"Dictature, dictature !" "Démission du gouvernement de coup d'Etat !" Les partisans en colère de Mir Hossein Moussavi, largement battu à la présidentielle, ont protesté samedi par milliers dans le centre-ville de Téhéran où ils affrontaient la police.
Les partisans de l'ancien Premier ministre, qui n'a obtenu que 33,75 % des voix au premier tour de l'élection vendredi, se sont rassemblés spontanément dans le centre de la capitale après les accusations d'"irrégularités" dans le vote lancées par M. Moussavi, selon une correspondante de l'AFP sur place. D'autres ont bloqué l'avenue Vali Asr, l'une des plus grandes de la capitale.
Les manifestants se sont en fait déployés dans tout le quartier, non loin du ministère de l'Intérieur, protégé par les forces de l'ordre. Un bus a été brûlé par des manifestants avenue Motahari qui donne sur Vali Asr.
Les manifestants ont incendié plusieurs motos de la police et allumé des feux sur la chaussée en arrachant des branches des arbres, alors que la police utilisait largement du gaz lacrymogène. Les vitres de nombreuses voitures étaient brisées, a constaté une journaliste de l'AFP. Plus au sud, quelques centaines de jeunes qui manifestaient près du ministère de l'Intérieur étaient dispersés brutalement par la police et des hommes en civil.
"Ils ont ruiné le pays et ils veulent le ruiner encore plus"Avenue Africa, une centaine de jeunes scandaient des slogans en faveur de M. Moussavi et criaient "Mort au dictateur". Au carrefour Jahan Koudak, d'autres manifestants ont lancé des pierres sur la police et mis le feu à des poubelles, aux cris de "Moussavi, Moussavi, récupère nos votes".
La police, qui avait ordre d'empêcher toute manifestation, a chargé plusieurs fois les manifestants à la matraque sans toutefois réussir à les disperser. Avenue Vali Asr, des hommes en civil à moto s'en sont pris à de jeunes manifestants pro-Moussavi, les frappant à coups de matraque, selon un témoin. Plus tôt, les supporteurs de M. Moussavi se sont rassemblés devant le QG de leur candidat aux cris de "Nous resterons ici, nous mourrons ici".
"Ils ont ruiné le pays et ils veulent le ruiner encore plus pendant les quatre ans qui viennent", ont-ils lancé à l'adresse des partisans du président sortant, Mahmoud Ahmadinejad, réélu avec une confortable avance. Un groupe de jeunes furieux a lancé des pierres en direction de la police, qui a répliqué en lançant aussi des pierres.
Les policiers sont également entrés dans plusieurs immeubles pour frapper les manifestants qui y étaient réfugiés. Sur la grande artère, l'ambiance est tendue et la police a demandé aux gérants de magasins des environs de fermer boutique. "Le temps des danses et des chants est terminé, ils vont vous casser les jambes si vous restez là", dit aux manifestants un responsable de la police.
Un homme étendu sur le pavé, habillé de vert, couleur de campagne de M. Moussavi, assure à l'AFP avoir été frappé sans qu'il ait quelque chose à se reprocher. "J'étais juste là, je regardais". Les partisans de M. Moussavi évoquent leur désarroi. "Je ne comprends pas ce qui s'est passé", dit une jeune femme qui refuse d'être identifiée. "S'ils doivent tricher, ils le font, et nous ne pouvons rien faire pour les en empêcher." Un peu plus loin, les partisans du président exultent.
"Où sont les Verts ? Dans une souricière !" scande un groupe de jeunes hommes roulant en voiture. Tout près du QG de M. Moussavi, deux employés de la municipalité repeignent le trottoir pour recouvrir les slogans "A bas le nain ! A bas le dictateur !" Les Gardiens de la révolution, l'armée idéologique du régime qui a apporté son soutien à l'ultraconservateur Ahmadinejad, ont averti qu'ils ne permettraient pas l'avènement d'une "révolution de velours", en allusion aux thèses de campagne de M. Moussavi, partisan d'une ouverture vers l'Occident.
Les partisans du leader d'opposition Mir Hossein Moussavi tentent de protéger un policier blessé durant les manifestations qui ont eu lieu à Téhéran
AFP PHOTO/BEHROUZ MEHRI