Burqa : vers une interdiction dans les services publics
Cécilia Gabizon
Le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux et André Gerin et le président
de la commission parlementaire, le 16 décembre à l'Assemblée. Crédits photo : AFP
Brice Hortefeux, Éric Besson et Xavier Darcos ont été entendus par la mission parlementaire sur le voile intégral. Alors que la mission parlementaire souhaite
interdire le voile intégral,
trois ministres sont venus mercredi tempérer ses ardeurs. «Nous n'avons
pas le droit à l'erreur» a lancé le ministre de l'Intérieur. «Si nous
décidons de légiférer, cette loi doit être solide juridiquement. Car
elle sera mise à l'épreuve. Rien ne serait pire qu'un texte annulé ou
qu'une loi inappliquée.»
Pour éviter d'être retoquépar le Conseil constitutionnel ou la Cour européenne des droits de
l'homme, un risque qu'aucun juriste n'a pu clairement écarter, Brice
Hortefeux privilégie une interdiction dans les seuls services publics.
Elle s'appuierait sur «la nécessité de pouvoir être identifié pour
toutes démarches personnelles (hôpitaux, guichets, transports en
commun…)». Cette interdiction aurait «l'avantage d'être applicable et
de répondre aux difficultés des agents du service public». Le ministre
a, par ailleurs, suggéré de faire du voile intégral, un critère
d'intégration à la communauté nationale : «Rien ne serait plus normal
que de refuser systématiquement l'accès à la carte de résident à la
personne portant ce voile et à son mari. (…) la naturalisation,
c'est-à-dire l'entrée dans la communauté nationale, ne me paraît pas
souhaitable en pareil cas.» Pour l'instant, quelque 1 900 femmes
portent le niqab et les trois-quarts sont françaises. «Mais il faut
signifier que nous n'acceptons pas le communautarisme radical», a
insisté le ministre. Xavier Darcos, visiblement gêné, souhaite,
lui, s'en tenir à une résolution parlementaire. Une déclaration
d'intention qui «aura l'effet d'une goutte sur des plumes de canard», a
regretté le député Jacques Myard. Car ces gens sont enfermés,
fanatisés». Le ministre des Relations sociales estime, lui, que
soutenir le principe d'«une République à visage découvert» suffira à
«relégitimer les agents des services publics qui demandent
régulièrement aux femmes de retirer leur voile intégral afin de
vérifier leur identité dans certaines démarches de la vie courante».
«Atteinte à la dignité humaine» Certains députés ont alors rappelé par la voix du socialiste Jean Glavany que la burqa était «intolérable», «qu'elle incarnait une idéologie barbare»,
«que les moyens de la bannir des services publics existaient» et qu'ils
cherchaient comment l'interdire dans l'espace public «intelligemment» .
«C'est un peu “courage fuyons” de la part des ministres», s'est désolée
la socialiste George Pau-Langevin.
Seul Éric Besson a conforté la mission,
en souhaitant l'interdiction totale. «Je suis bien averti des risques
encourus devant le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des
droits de l'homme. Je mesure ces difficultés. Mais ma conviction
personnelle est que notre République doit interdire cette atteinte à la
dignité humaine dans l'ensemble de son espace public.» «Ce voile
intégral fragilise notre capacité à faire émerger un islam de France»,
a conclu le ministre de l'Immigration. Chargés de faire des
propositions d'ici à la fin janvier,
les parlementaires de la missionpourraient opter pour une action en deux volets. Une résolution, qui
agirait comme un temps de médiation, qu'une loi viendrait au besoin
compléter.
LE FIGARO