Les Allemands s'opposent aux baisses d'impôt
Par Patrick Saint-Paul, correspondant à Berlin
La priorité selon Wolfgang Schäuble, ministre des Finances allemand, reste la réduction des déficits budgétaires.
Crédits photo : AFP
Les conservateurs et les libéraux s'affrontent sur de nouveaux allégements fiscaux. Angela Merkel convoque un sommet de crise. Le
débat sur les baisses d'impôts outre-Rhin a provoqué une nouvelle crise
au sein du gouvernement de centre droit dirigé par Angela Merkel. Après
avoir ferraillé pendant deux mois avant de s'entendre sur des
réductions fiscales de 8,5 milliards d'euros adoptées dans le budget
2010, pour stimuler la croissance, les conservateurs et les libéraux
s'opposent sur de nouveaux allégements prévus à partir de 2011. Ulcéré
par l'étendue des déficits allemands, le ministre des Finances,
Wolfgang Schäuble, issu de la CDU de la chancelière, a jeté un nouveau
pavé dans la mare en affirmant, hier, que les 24 milliards de baisses
d'impôts promis dans le contrat de coalition seront accordés à une
seule condition : qu'ils puissent être financés. La réalisation de ces
réductions fiscales « dépendra d'une part de la façon dont l'économie
aura évolué en mai et, d'autre part, des économies que la coalition est
prête à faire, a-t-il déclaré au quotidien Tagespiegel. Chacun doit
savoir que nous ne pouvons donner des impulsions pour obtenir plus de
croissance à travers des baisses d'impôts que si nous réduisons les
dépenses d'autant. » Selon le magazine Der Spiegel, le
ministère des Finances envisage de reporter après 2011 l'entrée en
vigueur de la réforme fiscale prévue. La réforme des taux d'imposition,
cheval de bataille des libéraux, n'aurait pas lieu au cours de la
législature. La priorité selon Schäuble est à la réduction des déficits
budgétaires, dangereusement creusés par la crise. À partir de 2011,
l'État allemand doit commencer à réduire le déficit de 86 milliards
d'euros, pour revenir dans les clous du pacte de stabilité européen à
l'horizon 2013. Et le gouvernement allemand doit « préparer les
citoyens à ces mesures d'économies », a averti le ministre des Finances.
Le soutien de l'opinion Schäuble
bénéficie d'un soutien inattendu : l'opinion. Selon un sondage publié
vendredi, 58 % des Allemands sont opposés à des réductions d'impôts
supplémentaires et seuls 38 % y sont favorables. Les principaux
économistes critiquent aussi des allégements fiscaux jugés inefficaces
pour doper la croissance. « L'argent qui doit être consacré à des
baisses d'impôts ayant peu de sens économiquement manque pour financer
des mesures qui apportent vraiment de la croissance », estime Gustav
Horn, directeur de l'institut IMK. Horn juge que ces fonds devraient
être investis dans un troisième plan de relance « qui se concentrerait
sur des investissements dans les nouvelles technologies écologiques et
la formation ». Les critiques laissent les libéraux du FDP
indifférents. « Sans croissance, il ne peut y avoir de consolidation du
budget. C'est pour cela que nous devons alléger la fiscalité sur les
citoyens », affirme le ministre de l'Économie, Rainer Brüderle (FDP). Le
chef du parti libéral, Guido Westerwelle, ne redoute pas la bagarre.
« C'est très positif lorsque l'on est critiqué parce que l'on tient ses
promesses électorales, a-t-il lancé. C'est pour cela que ces critiques
glissent sur nous. Nous tenons notre cap. » Angela Merkel a convoqué un
sommet de crise le 17 janvier à la Chancellerie, pour tenter d'aplanir
les différents.
le figaro