Israël veut sceller sa frontière avec l'Égypte
De notre correspondant à Jérusalem, Adrien Jaulmes
La frontière sud dans le désert,entre Israëlet l'Égypte.
Crédits photo : AP
Pour lutter contre l'immigration clandestine, une double rangée de clôtures va être installée entre le Néguev et le Sinaï. Israël
a décidé de clôturer sa dernière frontière encore ouverte. Le
gouvernement de Benyamin Nétanyahou a approuvé dimanche la construction
d'une barrière le long de l'Égypte pour lutter contre l'immigration
clandestine. Les autres frontières israéliennes sont déjà
scellées par un double grillage électrifié parcouru par des
patrouilles. Cette clôture court tout le long de la frontière
libanaise, entre la Méditerranée et le mont Hermon, puis sur le Golan
face à la Syrie, et enfin à travers la vallée du Jourdain et jusqu'à la
mer Rouge, face à la Jordanie. La paix signée entre Israël et le
royaume hachémite n'a pas été accompagnée du démantèlement de cette
barrière, construite après 1967 pour empêcher les infiltrations de
fedayins palestiniens. Une clôture sépare aussi Israël des
Territoires palestiniens. La bande de Gaza est hermétiquement close, et
environ 500 kilomètres d'une barrière de sécurité, mur de béton dans
les zones urbaines et clôtures électrifiées sur le reste du tracé,
séparent déjà Israël de la Cisjordanie. Trois cents kilomètres de cet
ouvrage restent à construire. La nouvelle barrière devrait être
érigée le long des 250 km de frontière entre le Néguev et le Sinaï
égyptien. Cette zone désertique est l'une des principales voies
d'entrée des clandestins en Israël. «Israël est le seul pays du monde
développé accessible à pied depuis le tiers-monde et l'Afrique, a
souligné Nétanyahou. Si nous ne nous protégeons pas, Israël sera inondé
par des centaines de milliers de travailleurs étrangers et de
clandestins.» D'après la police israélienne, entre 100 et 200
personnes pénétreraient chaque semaine en Israël via le Sinaï, en
provenance d'Afrique, notamment d'Éthiopie, d'Érythrée et du Soudan.
Plus de 100 000 clandestins seraient déjà présents en Israël selon la
police, chiffre excessif selon des organisations de défense des droits
de l'homme. Israël critique régulièrement l'Égypte pour son
manque de contrôle de la frontière. Le Sinaï, vaste péninsule
montagneuse et désertique, échappe largement au contrôle de la police
égyptienne, qui n'est présente que dans les villes et le long des
routes. Le territoire est peuplé par des Bédouins qui se livrent à
toutes sortes de trafics, de la drogue aux prostituées en passant par
les armes à destination des tunnels de Gaza.
Sparte plutôt qu'Athènes La
police égyptienne ouvre pourtant régulièrement le feu sur des migrants
africains tentant de se rendre en Israël. Vingt migrants ont ainsi été
tués en 2009, et 28 l'année précédente, selon les services de sécurité. L'Égypte
a fait savoir que la décision d'Israël de construire une barrière entre
les deux pays ne la concernait pas. «C'est une affaire israélienne», a
affirmé le porte-parole du ministère égyptien des Affaires étrangères. Le
nouveau projet de clôture devrait coûter environ 400 millions de
dollars. Il serait constitué de deux clôtures courant sur une
cinquantaine de kilomètres à partir de Gaza vers le sud, et d'Eilat
vers le nord. Entre ces deux barrières, des capteurs électroniques et
des radars seraient installés dans le désert, renforcés par des
patrouilles. Nétanyahou a cependant assuré qu'Israël continuerait à accueillir les demandeurs d'asile, notamment en provenance du Darfour. Environ
19 000 demandeurs d'asile sont arrivés depuis 2005, et des milliers de
travailleurs étrangers sont restés malgré l'expiration de leur titre de
séjour. Beaucoup vivent dans les bidonvilles de Tel-Aviv ou à Eilat,
près de la frontière égyptienne. Un éditorialiste du Yedioth
Ahronot remarquait avec tristesse que cette nouvelle clôture achèverait
d'entourer Israël de grillages. «Un pays entier vivant derrière des
barrières, entouré de tous côtés par un océan d'ennemis… Et ainsi sera
achevée la construction d'une Sparte moderne, alors que nous voulions
tellement devenir Athènes…»le figaro