Les deux mères du Prophète (P. et S. sur lui) - Un Sur les traces de Amina et Halima (un) : le bébé béni
Halima
Saâdia, la mère d'allaitement du Prophète (Prière et Salut soient sur
lui) est aussi commentée que sa mère réelle, Amina, sinon plus. Cela se
comprend. Le Prophète cultive un amour et un respect profond pour ses
deux mères. Amina pour l'avoir enfanté et Halima pour l'avoir allaité et
élevé durant sa tendre enfance jusqu'à l'âge de quatre ans. Toutes deux
sont d'origine médinoise, cultivées dans les valeurs de dignité et de
pureté héritées de la lointaine tradition de la religion monothéiste
laissée par Abraham et son fils Ismaïl dans la presqu’île arabique.
Curieusement
et contrairement à La Mecque, dont la majorité des habitants adoraient
plus de 300 divinités supposées être des intermédiaires qui
intercédaient auprès du Dieu Créateur ou qui avaient des pouvoirs
divins, les gens de Médine étaient plus libres et proches de la religion
d'Abraham par la simplicité de leur croyance. D'ailleurs, plus tard
lorsque les Mecquois fermèrent tout dialogue, le flambeau du triomphe
viendra du côté de Médine qui adopta très vite et entièrement la
nouvelle religion monothéiste.
Le bébé téta Halima
À
la naissance du Prophète, dite l'année de l'Éléphant, La Mecque était
une cité prospère qui commençait à faire parler d'elle. Aussi, nombre de
mères qui allaitaient s'étaient déplacées avec leurs maris ou membres
de la famille en une délégation des environs de Médine, frappée par la
sécheresse, à La Mecque à la recherche d'enfants à allaiter en
contrepartie de biens en nature ou en argent comme le voulait la
tradition. Les riches Mecquois s'adonnaient à cette pratique pour
permettre à leurs enfants d'être élevés très loin en campagne au grand
air et de recevoir une éducation enracinée. Halima, en compagnie de son
mari et son petit bébé Abdallah, qui deviendra le frère par le lait du
Prophète, était du voyage. On rapporta qu'ils arrivèrent en retard du
fait de la fatigue et du manque de nourriture et de la vieillesse de la
chamelle, montée par le mari, et de l'âne par la mère et son enfant. À
leur arrivée, tous les enfants en âge d'allaitement étaient pris, à
l'exception d'un seul que personne ne voulait du fait qu'il était
orphelin et donc sans ressources. De plus il avait refusé de téter
celles qui s'étaient proposées. Ce bébé de quelques jours seulement
n'était autre que le futur et dernier Prophète de l'humanité. Contre
mauvaise fortune, Halima fit bon cœur en conseillant à son mari de
prendre l'enfant pour ne pas retourner bredouille et dans l'espoir que
Dieu les récompense. Curieusement, le bébé se réveilla et accepta
volontiers de téter Halima.
Elle ne se trompa pas. Dès la première
nuit, elle prendra acte de bons signes. La chamelle retrouva comme par
miracle sa vitalité en donnant une bonne quantité de lait permettant
d'allaiter non seulement les deux bébés, mais également à Halima et à
son mari de boire à leur aise et d'oublier les déboires vécus.
La première baraka
se manifeste
Sur
le chemin du retour, le couple qui était à la traîne de la caravane
passa à la tête. L'âne aussi a retrouvé une seconde jeunesse, à la
surprise des membres de la longue caravane qui réalisèrent, eux, qui
s'étaient moqué du choix de Halima, que finalement celle-ci était bien
servie par la bonne chance et que l'enfant était porteur de bonheur.
Cela ne fait que débuter. Halima vit des merveilles et des moments
inoubliables en compagnie de ce bébé qui grandit très vite avec une
intelligence frappante et un comportement adorable et angélique. La
baraka entoura son domicile et son troupeau s'élargit en lui permettant
de sortir du besoin. On rapporta que toute la région avait profité de
cette baraka qui fit éloigner le spectre de la sécheresse et la famine.
Yathrib retrouva une stabilité et une prospérité inespérée.
Reconnaissante, elle lui rendit plus tard la pareille en se portant à
son secours et en lui ouvrant les bras lorsque sa ville natale, ingrate,
le chassa et le bouda dehors en le menaçant de mort.
Femme de
parole, Halima ramena l'enfant à La Mecque, une fois terminée la période
d'allaitement de deux ans. Mais elle demanda avec insistance à sa mère
Amina et son grand-père Abd el Moutaleb de lui renouveler le contrat
pour une seconde période sans chercher à demander une quelconque
contrepartie étant persuadée que l'enfant l'avait comblée de bonheur et
de biens. Elle tenait solidement à lui car il allait lui manquer
cruellement. Frappée par l'insistance de Halima, Amina acquiesça
finalement. Elle aussi tenait au bonheur de son enfant qui se portait
merveilleusement bien et loin du regard des envieux de La Mecque.
Ces bébés miraculeux
À
maints égards, l'histoire du jeune Mohamed ressemble étrangement sur
plus d'un plan à celle du jeune Youcef, fils de Yaâcoub, et ce qu'il
avait enduré en étant adolescent, de Moïse, lorsqu'il fut jeté bébé,
ayant à peine vu le jour, dans le Nil, de Jésus, fils de Marie, né
soudainement et miraculeusement en l'espace d'une heure, ou de Yahia,
fils de Zakaria.
Elle est bien plus singulière si l'on considère que
l'enfant fut pris à sa mère alors qu'il n'avait que quelques jours pour
ne revenir qu'â l'âge de quatre ou cinq ans, vivant à plus de 600 km de
son lieu de naissance avec des communications difficiles, alors que les
autres furent repris par leurs mères respectives. Bien plus tard,
lorsque le Prophète (P. et S.sur lui) évoqua le prophète Youcef, il dit
“mon frère Youcef” avec une connotation et un accent particuliers qui
sentaient le rapprochement entre les deux hommes, cimenté à jamais par
le grand destin. De même qu'il qualifia Moïse et Jésus de frères par la
prophétie, mais également par le sort et le destin. Il cultive un
profond respect pour son père lointain, le prophète Ismaïl, dont il est
le descendant. L'image de Ismaïl bébé et sa mère Hajar à la recherche
d'un point d'eau à La Mecque, alors désertique, est toujours présente
dans la mémoire collective.
Le Prophète partage avec cette lignée de
prophètes une naissance et une adolescence pleine de ressemblance.
Seule la Providence divine l'avait sauvé de la mort et de la disparition
certaine comme eux, en le mettant entre de bonnes mains. L'exemple de
notre Prophète est peut-être plus singulier. Comme eux, une fois grandi
et recevant le message divin, ces bébés miraculeux sauvèrent leurs
peuples de la pauvreté, de l'ignorance, de la tyrannie et de
l'idolâtrie. Tout un symbole.
S. B.