La technologie du laser est utilisée pour produire des données en trois dimensions et en continu sur la teneur en vapeur d'eau dans l'atmosphère qui devrait révolutionner la prévision météorologique en Suisse.
Le nouveau système de mesure «Light Detection and Rangin» (Lidar) a été inauguré officiellement dans la station de prévision de Météosuisse mardi à Payerne.
Cet instrument high-tech unique au monde fournit des données en continu sur l'humidité de l'air dans l'atmosphère en continu et de façon automatique jusqu'à une altitude de 10 kilomètres, avec une résolution élevée.
Il projette un rayon laser vertical dans le ciel trente fois par seconde, puis mesure l'«écho» – la lumière renvoyée par les différentes couches de l'atmosphère – pour en déduire des profils de température et de vapeur d'eau.
Ce système innovateur peut aussi détecter les particules fines, y compris les pollens et, d'ici 2010, sera en mesure de déduire des profils de températures en 3D.
Selon Météosuisse, la résolution spatio-temporelle de ce nouveau système laser devrait permettre de faire de grands progrès dans la prévision du temps.
«C'est un immense pas en avant, indique Bertrand Calpini, responsable du Centre de technique de mesure en météorologie de Payerne. Le fait d'avoir réussi à faire passer ce système du laboratoire à un service météo est une grande première.»
Un grand pas en avant
Et d'expliquer que l'intégration des profils d'humidité en temps réel dans les modèles de prévision permettra de faire de grands progrès, car on ignore actuellement s'il y a des couches sèches ou humides à 1000 mètres, par exemple.
Le Lidar devrait aussi jouer un rôle important dans l'évaluation du réchauffement climatique, un enjeu de taille actuellement, déclare de son côté Patrick Aebischer, président de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), qui a développé ce système de mesure.
Le projet est le résultat de vingt ans de recherche et de développement à l'EPFL, en collaboration avec MétéoSuisse et avec le soutien financier du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS).
«Le projet est un excellent exemple de transfert de technologie d'une école fédérale à un office fédéral», ajoute le président de l'EPFL.
Un système complémentaire
Le nouveau système constitue un pas important par rapport aux ballons-sondes qui ont besoin de plusieurs minutes pour atteindre les couches supérieures de l'atmosphère et ne peuvent être envoyés que quelques fois par jour. Mais il ne remplacera pas totalement les systèmes existants de prévision.
Malheureusement, le Lidar ne peut être utilisé que les deux-tiers du temps, explique Bertrand Calpini. «Quand il pleut ou qu'il neige, ou par temps très couvert, le système est aveugle et ne peut fonctionner. La lumière du laser ne peut absolument pas traverser les nuages.»
Par conséquent, il complétera les instruments traditionnels: un réseau de mesure au sol, les radiosondages au moyen de ballons-sondes, des radars de précipitations, les systèmes de télédétection que sont les profileurs de vent et les radiomètres de température, ainsi que la station du réseau mondial d'observation des radiations à la surface de la Terre (Baseline Surface Radiation Network).
L'Organisation mondiale de la météorologie suit de près le développement du nouveau laser, car ce type de technologie contribuera à remplacer et améliorer les systèmes globaux, dit encore Bertrand Calpini.
Pour l'instant, l'instrument suisse et le plus en avance et surpasse les capacités de projets de recherche similaires en Allemagne, aux Etats-Unis et aux Pays-Bas.
Un investissement nécessaire
Les responsables se montrent évasifs quant au coût total du Lidar: «750'000 francs pour le hardware et vingt ans de travaux de recherches qui atteint des millions». Mais ils affirment que l'investissement vaut la peine.
«Le Lidar servira de référence pour d'autres systèmes existants ou futurs, d'autant que la télédétection est une technique en plein essor», déclare le chef du projet, Hubert van den Bergh, professeur à l'EPFL.
Malgré son coût élevé, c'est exactement le genre d'instrument de mesure qu'il faut à un pays montagneux tel que la Suisse, affirme M. Calpini.
«Si vous allez du nord au sud sur 200 kilomètres, vous passez de
montagnes de 4000 mètres à des endroits proches du niveau de la mer.
C'est extrêmement difficile de faire de la prévision du temps en Suisse», ajoute-t-il.
swissinfo, Simon Bradley à Payerne
(Traduction de l'anglais: Isabelle Eichenberger)
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