500 millions de dollars pour un divorce
Mathieu Delahousse
L' État russe devra se défendre d'avoir favorisé le milliardaire Alexeï Mordashov (ici en 2009, à Moscou).
Crédits photo : RIA Novosti
L'ex-femme d'un oligarque attaque Moscou devant la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg. Les
sommes en jeu sont colossales et le dossier, bien habituel. La Cour
européenne des droits de l'homme de Strasbourg se prononcera bientôt
sur l'affaire du divorce d'un milliardaire russe et de sa première
épouse. Le contentieux pourrait déboucher sur l'un des divorces les
plus chers du monde. Alexeï Mordashov, à la tête du groupe
sidérurgique Severstal, était en 2008 classé dix-huitième plus grosse
fortune mondiale. Ce quadragénaire a proposé en 2006 de devenir l'un
des acquéreurs de l'européen Arcelor. Côté vie privée, il s'est séparé
de son épouse Elena en 1992. La bataille judiciaire n'a depuis
jamais cessé. Plusieurs décisions confirmant le divorce ont été
prononcées en faveur de monsieur. Mais pour madame, la puissance et
l'influence de l'époux auraient pu influencer les décisions. Elle s'est
donc retournée vers la Cour européenne pour « procès inéquitable ». Et
l'État russe doit exposer ses arguments pour se défendre, soulignant
qu'au moment du divorce, Alexeï Mordashov n'avait pas encore acquis le
poids qu'il représente aujourd'hui.
La pomme de discorde Dans
leur recours, les avocats de l'ancienne épouse, Elena Novitskaya,
estiment que « l'influence que M. Mordashov possédait et possède encore
a eu un effet direct sur la façon dont [l'affaire] a été considérée ».
La pomme de discorde concerne les parts de sociétés acquises par les
époux avant leur séparation, leur valeur ayant flambé depuis. Un
premier accord de division du patrimoine avait été signé mais contesté
par Elena Novitskaya à partir de 2001. Procédures apparemment
ordinaires mis à part le montant réclamé par la justice en 2003 pour
admettre son appel : 213 millions de roubles (6 millions de dollars) au
titre du « timbre fiscal ». Tout comme en France, où tout plaignant
peut être amené à verser une consignation au début de la procédure,
cette caution est réclamée par les Russes afin d'empêcher les
procédures abusives. Son montant, souligne le gouvernement russe dans
ses conclusions à la CEDH, avait été calculé en fonction des sommes en
jeu… Cette somme, contestent les avocats de l'ancienne épouse, était
« discriminatoire et disproportionnée ». En clair inéquitable. En
conclusion de leur première requête, déposée en mars 2009, l'épouse
réclame 500 millions de dollars de réparation. La décision définitive
des juges de Strasbourg ne manquera pas d'être largement commentée si
elle fait figurer l'affaire dans le palmarès des plus impressionnants
divorces de milliardaires…
le figaro