LE NOUVEAU CODE DE LA ROUTE EN VIGUEUR DEPUIS SIX MOIS
Le «tout-répressif» en attente des résultatsLe code de la route, version
modifiée et complétée par l’ordonnance n°09-03 du 19 août 2009, est
entré en vigueur depuis près de six mois. Sa promulgation avait comme
principal objectif d’«endiguer le nombre croissant de morts sur les
routes». Des mois après, le «tout-répressif » a-t-il donné les
résultats escomptés ?
Abder Bettache - Alger (Le Soir) - Adoptée en
pleine période estivale, le 30 juillet 2009, la nouvelle loi, qui se
propose en principe de s’attaquer aux fléaux des accidents de la
circulation, a des relents mercantiles tant elle entend faire sèchement
payer au conducteur la moindre erreur. A travers ce nouveau dispositif,
le législateur a voulu frapper fort. Il a même instauré des peines de
prison ferme. Le retrait du permis de conduire est également
automatique pour quasiment toutes les infractions. Les amendes
forfaitaires, quant à elles, sont d’un montant «minimum de 2 000 DA qui
peut être doublé en cas de non-acquittement dans un délai de dix
jours». Or la réalité du terrain est tout autre. Pour preuve, les
accidents de la route ont connu en ce début de l’année 2010 une
recrudescence inattendue. Les morts se comptent par dizaines chaque
mois. Aujourd’hui, l’application de ces sanctions est sujette à
polémique. Nombreux sont ceux qui ont dénoncé et qui continuent de
dénoncer «l’abus d’autorité de la part des services de sécurité qui
recourent systématiquement au retrait du permis de conduire pour
n’importe quelle infraction ». Ces derniers, pour leur part, expliquent
qu’ils ne sont que «des exécutants d’une loi promulguée par les
représentants du peuple». Or, pour un grand nombre d’observateurs, «le
législateur s’est quelque peu précipité à mettre en place un dispositif
répressif». «Il aurait été plus juste, avant d’entamer cette étape,
d’opter pour la sensibilisation et de situer l’enjeu d’une mesure
radicale». Avant de punir un citoyen pour une faute mineure, en
particulier, il faut, auparavant, s’assurer que les infrastructures
adéquates ont bien été mises en place et offrir un environnement sain à
l’automobiliste fauteur avant de décider de sanctionner. Car s’il est
vrai que le facteur humain entre en compte dans de nombreux accidents
de la circulation, il n’en demeure pas moins que d’autres éléments,
tout aussi déterminants, «poussent les conducteurs à la faute»,
argue-t-on. En somme, les avis sont unanimes : l’Etat propose des
remèdes qui ont déjà prouvé leur inefficacité. Là, le constat s'impose.
L'idée que se font les «technocrates», celle d’avoir pour objectif de
réguler la société, voire de réduire les délits, en frappant fort au
portefeuille, a montré ses limites. L’on comprend dès lors le tollé
général soulevé par ces nouvelles dispositions. Les critiques pleuvent
de partout. L’esprit des conducteurs est en permanence traversé par
cette interrogation : «Et si on venait à m’interpeller ? Ils
n’imaginent pas à quel point cela est paralysant. Des familles entières
sont bloquées lorsque le père ne dispose pas de son permis de conduire.
Le tout-répressif est-il véritablement le moyen adéquat pour mettre fin
à cette tragédie ?» C'est plutôt toute une politique de contrôle et de
régulation qu'il faut revoir, soutiennent d’autres sources : «Avant de
toucher à la poche du citoyen, comme c’est le cas, il aurait été
préférable de préparer l’environnement et le mettre au diapason des
objectifs attendus.» Il s’agit notamment de lutter contre les
passe-droits, le laisser-aller et autres actes de favoritisme. Un
passage obligé pour contribuer à lutter efficacement contre les drames
de la route. Enfin, il est à noter qu’en moins de dix ans, trois
réformes du code de la route ont été mises en œuvre. Et des lois ont
été promulguées. Mais l’hécatombe est toujours là.
A. B.